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Du 15 au 21 novembre 2004
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De Saint-Jean-Pied-de-Port (France) à Azofra (Espagne)
Il fait froid à Saint-Jean-Pied-de-Port ce lundi 15 novembre matin et la brume s'est généralisée lorsque nous vous retrouvons pour ce huitième partage de nos pérégrinations. Tout le monde s'est levé de bonne heure, heureux et conscient de ce qui nous attend aujourd'hui: l'étape-phare de ce raid avec la traversée des Pyrénées...
Peu de mots sont échangés. Chacun a révisé son équipement la veille, rempli sa tâche et se prépare dans la sérénité. Cinq cavaliers (Jean-Claude, Julie, Jérémie, Frank et Georges) se préparent, concentrés, sous l'oeil ravi de Pierrot. Cinq compagnons de route parfaitement entrainés et équipés piaffent d'impatience : Kézako, Eliott, Indien, Horace et Yago.
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Le début de l'ascension s'effectue sur six kilomètres de route goudronnée et, lorsque nous obliquons à gauche pour nous engager sur le sentier caillouteux, un automobiliste bien intentionné nous rattrappe pour nous informer de l'état du col de Bentarte : 4O cm de neige au sommet, pas possible avec des chevaux. C'était mal connaître Jean-Claude et ses chevaux. Jusqu'à 5Ocm nous pouvons passer. Deux inconnues subsistent lorsque nous décidons de passer malgré cet "amical avertissement". Y-a-t-il des congères et si oui, ne sont-elles pas trop hautes, et deuxièmement, quel est l'état du balisage ? Curieux de voir dans quoi nous nous lançons, le givre commence à envahir notre environnement et le vent glacial nous oblige à fermer toutes les "écoutilles".
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Malgré ces rudes conditions hivernales, des Potiok d'élevage ou en liberté, observent notre progression. Nous retrouvons un peu de bitume (rassurant par les temps qui courent) avant de voir la plaque "Roncevaux" à droite recouverte de givre et de... neige nous envoyant sur un sentier rocailleux. Les pourcentages de montée ne sont étonnamment pas trop élevés mais l'ascension est longue et régulière et l'épaisseur de neige augmente graduellement. Le vent glacé, mais trop violent, nous oblige à courber tête vers le sol où les traces fraîches d'un 4x4 et d'un piéton téméraire nous rappellent que nous ne sommes pas seuls au monde. Le sommet du col franchi, la "Fontaine de Roland" laisse encore couler un filet d'eau que se disputent nos destriers assoifés par quatre heures d'ascension.
Le début de la descente présentera, techniquement, l'endroit le plus délicat à traverser. Là, le terrain en forte pente, masqué par une congère profonde, nous démontrera le sens de l'équilibre de nos compagnons de route. Ils glissent, s'enfoncent dans la neige mais jamais ne paniquent. Dans ces conditions extrêmes, ils se montrent remarquables de sang-froid. Sur l'autre versant du col, la brume se dissipe rapidement, laissant passer quelques rayons de soleil. Une légère côte nous permet même un galop dans la neige redevenue moins profonde. En quelques minutes de descente, le plein soleil est là, la neige disparaît et nous marchons dans une forêt de feuillus sur un chemin tapissé de feuilles mortes dans des panoramas de montagnes grandioses. Le choc est saisissant. La transition brutale. Voyage à travers le temps et l'espace, jusqu'à Roncevaux où Pierrot nous attend avec son sourire légendaire, heureux comme nous du succès de cette formidable traversée.
Nous faisons notre première étape espagnole à Burguete d'où nous repartons, mardi 16, pour une très fraîche (il gèle le matin) et longue (35 km) route vers Pampelune avec beaucoup de dénivelé de moyenne montagne, de passages de rivières à gué, de portillons à ouvrir, à refermer. Nous découvrons le Camino espagnol, très bien balisé, entretenu avec soin, parsemé d'"albergue", d"hospidal" pour pèlerins.
Mercredi matin, nous transportons les chevaux à la sortie de Pampelune, trop grosse ville à traverser par le Camino, pour une courte mais belle étape vers Puente la Reina. Un chaud soleil est de nouveau de la partie et pourtant nous sommes le 17 novembre. On croit rêver. On ne l'attendait plus dans cette "froide" Navarre.
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Jean-Claude remonte à Orthez, chez Royal Horse, rechercher le complément alimentaire qui nous permettra de tenir jusqu'à Compostelle et nous laisse gravir la sierra del Perdon. Le paysage change. Au sommet, une série d'éoliennes domine l'immensité du paysage. Vue de là-haut, la Navarre en impose. Elle en impose encore, égrenant ses églises romanes massives au fil du Chemin. Il gèle la nuit.
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La matinée est encore fraîche quand nous quittons Puente la Reine après les traditionnelles photos sur le "Pont de la Reine". Après l'ascension du premier col découvrant ces mêmes paysages immenses, nous découvrons une autre facette du Camino : il nous amène en effet en plein milieu d'un chantier d'autoroute. Camions et pelleteuses s'arrêtent pour nous laisser passer quand il le faut. Nous arrivons de temps en temps à longer ou sortir des travaux mais ils nous gardent en ligne de mire toute la journée. Même dans les villes ils nous poursuivent. Nous leurs échappons miraculeusement à la sortie d'Estella, où divine surprise, la fontaine d'Irache débite non pas de l'eau mais du... vin ! Inutile de préciser que le restant de l'étape, pourtant en montée, jusqu'à Luquin, comme sur un nuage, nous a paru très court et le paysage changeant: cultures en terrasse, oliviers, arbousiers.
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Vendredi matin, le temps s'est couvert pour notre soixante-sixième journée de vie pas si commune de pèlerins équestres. Journée en deux parties puisque la matinée se passe sur les sentiers-boulevards séparants les champs de cultures céréalières permettant de longs galops et que l'après-midi nous balade sur des chemins de mule à travers vignes et oliveraies, serpentants à proximité de la route nationale qui va à Viana, typique petite ville en pleine rénovation-extension aux ruelles étroites chargées d'histoire médiévale à 4 km de Logrono.
Encore une grosse ville que nous court-circuitons le lendemain, samedi 2O, quittant la Navarre pour partir à la conquête de la Rioja. Nous plongeons directement en plein vignoble de Rioja duquel émerge, à notre grand étonnement... un superbe jeune étalon en liberté fort peu surveillée. Pas bien méchant, d'humeur plutôt joueuse, il décide de nous accompagner malgré nos tentatives d'intimidation et autres galops destinés à le décourager dans son entreprise. Il finit par nous abandonner quand nous croisons une route dont l' asphalte semble délimiter son territoire. Nous nous régalons de délicieux raisins délaissés par les vendangeuses mécaniques, admirons les montages de galets réalisés par les pèlerins jusqu'à Najera et ses falaises rouges. Nous traversons Najera, petite ville médiévale, en ressortons au galop pour atterrir à Azofra, petit village noyé dans le raisin du Rioja et qui nous accueille pour cette journée de (t)rêve dominicale.
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Grosses bises cavalières à vous tous-toutes en Allemagne, Belgique, France, Espagne et partout ailleurs.
Jean-Claude, Julie, Pierrot, Jérémie, Anita, Frank, Georges.
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