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www.terre-equestre.com/cavaliers-sans-frontieres
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Du 6 au 12 décembre 2004 - L'ARRIVEE |
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De Villafranca del Bierzo à Santiago (Espagne)
Jean-Claude fait cavalier seul ce lundi de Saint-Nicolas qui nous voit partir de Villafranca del Bierzo. Le week-end a été relativement agité et le pick-up a été endommagé par un chauffard ivre durant la nuit. Jean-Claude a besoin de se retrouver seul avec Kézako, convalescent. Il ira le tester durant quelques heures dans les Monts du Cebreiro, histoire de se faire plaisir avec son fidèle ami. Et c'est là, au sommet du Cebreiro, que nous nous retrouvons tous après une étape ensoleillée, très chaude (on croit rêver en ce mois de décembre), assez quelconque dans sa première partie le long de la Nationale dans la vallée de Valcarcel. L'ascension du Cebreiro, par contre, là, durant 9 km, c'est l'émerveillement à chaque virage. Les chevaux sont dans la forme des grands jours. D'un pas décidé et volontaire ils avalent les pentes comme sur le plat. Leur rythme est un régal et ils nous permettent, ainsi dégagés de la contrainte de les pousser, d'apprécier les paysages qui défilent, les panoramas grandioses qui se succèdent en prenant de la hauteur. O Cebreiro, charmant petit village juché au sommet à 1300m d'altitude, nous accueille pour ce qui est probablement l'un de nos campements les plus idylliques. Quand, après une telle randonnée, on se retrouve autour d'une bonne table entre amis, au beau milieu de tant de beautés terrestres et célestes, on ne peut que s'extasier devant les cadeaux que la vie nous fait.
Mardi, nous ne quittons pas trop brutalement ce décor enchanteur. La Galice, que nous abordons maintenant, recèle, elle aussi, bien des attraits et, comme nous entamons les 150 derniers kilomètres, désormais, tous les 500 m seront marqués d'une borne rappelant la distance qui nous sépare de Santiago.
Le passage à l'Alto de San Roque (1270 m, où un gigantesque pèlerin en métal semble en lutte contre les vents violents rêgnants ici) nous permet d'accéder à la descente vers Triacastela qui nous reçoit et où nous vivrons l'une des soirées les plus arrosées... au bar du village. La tension monte. On sent qu'on arrive. Le décompte des jours a commencé. On arrive, en principe, samedi.
Mercredi matin, il fait très froid. Il a bien gelé. Le sommeil a été agité et les chiens du village ont aboyé toute la nuit pour se réchauffer probablement. Le groupe électrogène a autant de difficultés à se mettre en route que nous.
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Heureusement, la verte Galice a tôt fait de nous revigorer avec ses petits sentiers, sous-bois, murets de pierre qui rappellent à chacun un petit bout de son propre pays sous le soleil d'automne. On arrive à Trente, lieu-dit à la sortie de Sarria, assez tôt parce que nous n'emportons désormais plus de pique-nique. Nous faisons toutes les étapes sans halte-repas de façon à être rentrés au plus vite au camion pour nous retrouver entre nous. Le décompte est vite fait. Il nous reste trois jours à cheval. Les ferrures commencent à s'user de façon inquiétantes. Tiendront ? Tiendront pas ? Remettre des clous en attendant ?
Mauvaise nouvelle : Fred ne pourra pas venir nous aider à rapatrier les chevaux, ce qui obligera Jean-Claude à faire un véritable marathon (22OO km) dès l'arrivée samedi pour aller chercher un van supplémentaire en Aveyron. Il gèle toujours la nuit, mais moins fort et le soleil écarte rapidement les brumes matinales. C'est le printemps en Galice. Jean-Claude ne monte pas avec nous. Il doit faire réparer la direction du pick-up et changer les quatre pneus avant d'envisager l'aller-retour de folie du week-end. A cheval, c'est la rando-résumé de tout ce qu'on a traversé depuis le départ mais les premiers eucalyptus font leur apparition nous rappelant au passage que nous approchons du but. Nous sommes à Palas do Rei : plus que deux jours. Le soir, Jean-Claude nous rejoint tout heureux de son périple réparateur, un "pneu" fatigué, et nous dégustons, tous ensemble, la spécialité locale dans une pulperia en compagnie de nombreux pèlerins de toutes nationalités.
Vendredi 10 matin, c'est la catastrophe ! Jean-Claude n'a pas fermé l'oeil de la nuit et ne peut plus supporter la douleur à la poitrine qui le tenaille... infarctus ! Nous l'embarquons au plus vite chez le médecin pendant que les préparatifs pour l'étape du jour se poursuivent. Cavaliers-sans-frontières ira jusqu'au bout, c'est la volonté de Jean-Claude.
Journée sans rythme, morose, les chevaux sont difficiles, n'avancent pas, s'effraient de tout et de rien... le coeur n'y est plus. La tête non plus. Ca monte, ça descend , il y a de plus en plus d'eucalyptus, un beau pont de pierre.... Dans la traversée d'Azrua, Yago trébuche et s'ouvre les deux genoux tandis que Horace casse un fer postérieur. Appel est fait à l'assistance pour récupérer chevaux et cavaliers à la dérive. Julie et Reina terminent courageusement l'étape à Rua, village situé à 18 km de Santiago.
Le ressort est cassé. Seul nous importe l'état de santé de notre leader. A notre grand soulagement, il est très bien pris en charge et, médicalement, son état est stabilisé. Pour Jean-Claude, le raid s'arrête là, mais "Cavaliers-sans-frontières" qu'il a mis au monde a grandi et peut maintenant marcher seul.
Nous décidons de retarder notre arrivée d'un jour et de faire étape aux portes de Compostelle, à Monte do Gozo, à 4 km de la cathédrale si souvent entrevue dans nos rêves. Mais le rêve de la voir dans toute sa splendeur, tous ensemble, s'est brisé. Le soleil de plomb qui nous accompagne ce samedi ne pourra jamais déloger la chappe de tristesse qui s'est abattue sur nous. Demain, nous y sommes. Deux ans de préparation, 89 jours de randonnée. Nous ferons 4 km symboliques en apothéose de ce raid sans frontières.
Ce dimanche 12 décembre 2004, on se lève tôt, car, contrainte administrative, il faut être entrés avant neuf heures trente sur la Plaza avec des chevaux, pas question de s'attarder.
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La traversée silencieuse de Santiago encore endormie nous permet d'apprécier dans le recueillement la douce euphorie qui nous gagne à l'idée de toucher au but, bercés par le pas nonchalant de nos compagnons de route que nous ne poussons pas à accélérer.
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9 h 40 ! Elle se dresse là, devant nous, magnifique dans sa robe de dentelles, majestueuse de lumière, resplendissante !
Nous y sommes ! Oui, mais pas tous...
Il en manque UN. Et pas n'importe lequel. Il nous manque celui qui nous a invité à l'accompagner dans cette aventure, celui qui a travaillé durant deux ans à monter ce projet hors normes, celui qui a construit de ses mains le cocon qui nous a abrité durant 89 jours, celui qui nous a menés jusqu'aux portes de Santiago : il nous manque notre guide, il nous manque toi, Jean-Claude.
Tu nous a laissés seuls ici, mais nous savons tous que depuis ton départ, partout tu nous suis, tu es toujours là. "Il manque ton rire, je m'ennuie. Il me manque toi, mon ami." (de Jean-Louis Aubert).
Merci, Jean-Claude. Bises !!!... dont tu avais beaucoup besoin, que tu as réclamées et que nous t'avons refusées, par pudeur, par peur, par connerie. Nous t'aimons. Tel que tu es. Avec tes coups de gueule. Mais promet-nous à tous une chose : de prendre soin de toi, de t'écouter, d'écouter ton corps réclamer de la tendresse, du repos, du respect de façon à ce que tu puisse encore nous engueuler souvent et longtemps sur les routes de France ou de Navarre, à pied, à cheval, ou en vélo (très bon pour ta rééducation).
Re-bises. On t'aime.
Julie, Pierrot, Moustapha, Anita, Franck, Reina, Miguel, Maïté, Georges ,"waf, waf" Dédé et tous ceux qui ont partagé notre aventure et nous ont soutenus de toutes les manières possibles.
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Georges Fohn, Cavaliers sans Frontières
de nationalité Belge, extraordinaire auteur du récit de cette belle aventure humaine.
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Pierrot a assuré l'intendance... toujours avec le sourire.
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Jean-Claude Mouisset et Kézako sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle
Des nouvelles de notre ami : après une première intervention chirurgicale en Espagne, Jean-Claude va pouvoir rentrer à Rodez jeudi 16 décembre.
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A mon ami Jean-Claude...
Dimanche, après avoir fait un voyage de 1 300 km pour assister à ton arrivée, j'ai éprouvé un sentiment de profonde injustice, partagé par tes compagnons, heureux de se retrouver devant la cathédrale de Santiago mais si tristes sans toi. Kézako lui aussi était malheureux...
Il y a deux ans, j'ai eu la chance de te rencontrer, toi mon ami. Tu es un homme bon et généreux, alors prend soin de ta vie, elle est précieuse pour les personnes qui te côtoient. Promet-moi de tout faire désormais pour vivre pleinement et continuer à nous faire partager tes passions, tes rêves, tes voyages à cheval et tous tes projets.
Maryse de Terre-Equestre
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